LES RENDEZ-VOUS CULTURELS DE DÉCEMBRE

Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir

Extrême hôtel

Raymond Depardon

Du 2 décembre 2025 au 12 avril 2026

Pavillon Populaire à Montpellier


Un titre d’exposition se référant à un hôtel d’Addis-Abeba en Éthiopie, où le photographe a séjourné à plusieurs reprises lors de ses photo-périples solitaires. Déterminante parmi les reportages de Raymond Depardon (né en 1942), la fameuse série Glasgow réalisée en 1980 pour le Sunday Times sera montrée en une projection restituant le climat de cette commande. Autre exclusivité, Extrême Hôtel exposera pour la première fois une série capturée à la chambre photographique, du Texas au Nouveau Mexique au printemps 2019. Ces clichés de grandes plaines désertiques et petites villes américaines désolées mettront en lumière le regard unique et humaniste du photographe voyageur.

Une carte blanche et une période, 1978-2019, mise en lumière par une centaine de clichés. Villes animées, territoire en crise, mais aussi travail intime et contemplatif, nous dévoilent une partie encore méconnue de son travail en couleur. Une série en couleur issues d’une récente donation au musée Fabre, dans un écrin entièrement rénové.


Entrée libre. Dernière entrée 15 minutes avant la fermeture.

Visites guidées hebdomadaires :

Vendredi 16h, samedi et dimanche 11h et 16h

Visites familles : mercredi et dimanche 11h et 15h

Réservation obligatoire pour toutes les visites de groupes (guidées ou non) 

visites@montpellier.fr


Pavillon Populaire
Esplanade Charles de Gaulle, Montpellier

Avec la lagune

Rencontres dessinées par Aurélie Carmet

Jusqu’au 7 décembre à 20h30

Carré d’art Louis Jeanjean à Mèze

On s’acharne à la qualifier d’étang, mais c’est bien la lagune de Thau, un milieu aquatique unique, qu’Aurélie Carmet a fait sienne. L’artiste a fait de ses crayons et pinceaux des outils instantanés et instructifs, ouvrant sur le dialogue. Je m’accroche à la pédagogie, c’est à ça que je crois, je me dis qu’il faut expliquer les choses pour casser les barrières et faire des ponts entre les gens. Le dessin est médiateur, assure-t-elle. Écoutant celles et ceux qui y vivent afin de collecter la matière première de son travail, et partager l’extraordinaire diversité de ce territoire particulier par une poésie sur papier aquarelle. Sa technique donne lieu à des croquis vitement décochés, un horizon, un geste, une silhouette. Sans l’aide d’appareil photo, juste un carnet.


Du jeudi au dimanche, 10h-12h30 et 15h-17h


Carré d’art Louis Jeanjean

21 rue Sadi Carnot, Mèze

Exposition Néo Pop Art

Vincent Sabatier

Jusqu’au 3 janvier

Médiathèque Théodore Monod à Juvignac


Artiste et designer reconnu par les collectionneurs du monde entier, Vincent Sabatier encapsule son Néo-Pop Art dans un baume aussi transparent qu’inattendu. Ses objets agglomèrent la sérigraphie, la résine d’inclusion et la fibre de verre par un procédé original d’amalgame qu’il a fait breveter sans attendre. Ses œuvres, riches en effets de matière et de lumière, revisitent les icônes collectives par une approche audacieuse et récréative. Des éléments issus de la culture populaire, notamment à travers ses roboclusions, des compositions où des figurines et objets iconiques sont résinés. En attendant l’ultime démonstration de sa manière, quand l’artiste se fera lui-même encapsuler…

 

Mardi, mercredi, samedi 10h-12h30 et 14h- 18h

Vendredi 14h-18h

Contact 04 67 10 40 30
mediatheque@juvignac.fr


Le site de l’artiste

Le site Vincent VerSus Sabatier néo pop


Médiathèque Théodore Monod
2 rue du Poumpidou, Juvignac

Exposition Henri Comby

Jusqu’au 31 décembre

Musée d’Art Brut à Montpellier


Artiste inclassable, Henri Comby (1928-2004) change de médium après un imprévu qui l’incite à tout bousculer. Dans les années 50, l’arrivée de l’aluminium et des machines-outils lui ouvre un terrain d’expérimentations enthousiasmant : carapaces, tabernacles hérissés, tuyauteries follement prêtes à se défendre… ou à charger ! Plus tard, il crée des barques et des chars où la guerre se mêle à la poésie du voyage, donnant naissance à des embarcations d’aventure, funéraires ou conquérantes. Et puis viennent ses cahiers, où il note et dessine les absurdités du monde comme un comptable de l’inouï. Quant aux têtes, de pierre, de bois ou de laiton, elles hurlent son angoisse, écho tenace de la charcuterie familiale de son enfance.


Ouvert du mercredi au dimanche 10h-13h et 14h-18h

Contact 04 67 79 62 22


Musée d’Art Brut

1 rue Beau Séjour, Montpellier

Buxbaumia

Photographies de Cédric Gerbehaye

Jusqu’au 13 décembre

Château d’Assas, Le Vigan


Buxbaumia, petite mousse rare des zones froides, inspire l’exposition de Cédric Gerbehaye, premier artiste accueilli par imageSingulières dans son nouveau refuge cévenol d’Aumessas. De 2024 à 2025, le photographe a arpenté ces paysages, mêlant immensité et infiniment petit, convaincu que l’attention au détail éclaire le monde. Le château d’Assas au Vigan présente cette exposition coproduite avec le Département du Gard. Gerbehaye, connu pour son regard humaniste, révèle un territoire vivant, habité, où se croisent enracinement, renouveau, sous-bois et rencontres. La buxbaumia, fragile et discrète, devient le symbole de ce vivant précieux à protéger.


Du lundi au vendredi : 9h30-12h et 13h30-17h
Eentrée libre
Réservation : Chantal Maucouvert
06 79 05 07 65

chantal.maucouvert@gard.fr


Le photographe sur Instagram


Château d’Assas

1 route de Saint-Vincent, Assas

Don’t disturb

Photographies & Graphismes : Une inversion des rôles

Exposition de Jean-François Demont
Jusqu’au 6 décembre

Galerie Le vent se lève à Sète


Dont disturb imagine des animaux sauvages excédés par les touristes, décidant d’inverser les rôles. Une délégation débarque à Sète, semant stupeur et sourires : les photos de Jean-François Demont en gardent la trace, mêlant poésie, humour et doux chaos. En écho, une collection d’affichettes venues du monde entier rappelle notre désir universel de tranquillité et interroge, avec malice, notre rapport au vivant. L’artiste raconte qu’enfant, une panne de voiture a déclenché sa passion : en attendant la dépanneuse, il photographie le château de La Rochefoucauld… et ne lâchera plus jamais un appareil. De La Défense aux espaces naturels, de la Papouasie à Sète, son regard s’affine, nourri par un stage de photographie contemplative et une curiosité intacte.


Ouverture de la galerie sur rendez-vous ou quand il y a de la lumière.

Contact 06 07 21 16 77

7leventseleve@gmail.com 


Galerie Le vent se lève

51 quai de Bosc, Sète

Construire

Sylvain Corentin, Charles Malherbe

Jusqu’au 31 décembre

Musée Maison des Consuls, Les Matelles


La Maison des Consuls accueille deux artistes qui jouent avec le volume et la sculpture. Sylvain Corentin crée des œuvres instinctives, blanches, parfois monumentales, où l’improvisation fait loi : un monde intérieur qui s’étire en formes et en dessins narratifs. Charles Malherbe, lui, scrute nos fragilités contemporaines — effondrement, résilience, énergie — à travers des sculptures miniatures d’une précision réjouissante. Bois, métal, pierre ou plastique : il assemble ces matériaux pour bâtir des refuges minuscules, des fragments d’architectures oubliées, presque des stations d’observation venues d’anciennes civilisations. Ensemble, ils nous invitent à rêver, à questionner l’avenir et à voyager dans un imaginaire fait de traces, de volumes et d’élans créateurs.


Ouvert du mercredi au dimanche 14h-17h

Contact 04 99 63 25 46

maisondesconsuls@ccgpsl.fr


Musée Maison des Consuls

Rue des Consuls, Les Matelles

Gaulois, mais Romains !

Jusqu’au 4 janvier 2026

Musée de la romanité à Nîmes


Culminant les 12 travaux d’Hercule, celui d’en finir avec le stéréotype du Gaulois, rustique barbare couvert de peaux de bêtes, a la dent dure et de beaux jours devant lui. Le musée de la Romanité s’est donc donné pour mission de bousculer nos fourbes imaginaires. Et de nous démontrer comment, durant près de trois siècles, les habitants de la Gaule conquise par Rome en ont digéré la culture. Avant cela, les Gaulois possédaient déjà un assortiment de divinités assez complet et une kyrielle de druides chargés de la cueillette du gui sacré. Jules César s’employa donc à établir un peu d’ordre dans les mœurs et la tenue des livres de ses voisins, de les mettre à sa caliga, l’ancêtre de la botte. Mais, après sa mort, les empereurs qui prirent son fonds s’arrangèrent si bien que la conquête de l’Imperator leur échappa peu à peu. Entre temps, le musée de la Romanité n’a jamais si bien porté son nom, n’en déplaise aux gauloiseries ambiantes. Une immersion fascinante dans l’histoire et l’art de vivre gallo-romain. 


Ouvert tous les jours d’avril à octobre : 10h-19h

Dernière entrée une heure avant la fermeture


Billetterie

Plus d’infos museedelaromanite.fr


Musée de la Romanité

16 boulevard des Arènes, Nîmes

Jean-Pierre Blanche

Jusqu’au 31 décembre

Presqu’île de Maguelone


Du Sahel algérois à l’arrière-pays languedocien et provençal, Jean-Pierre Blanche (1927-2022) n’a eu de cesse de brosser l’essence et l’essentiel du panorama méridional. Ce peintre pas banal, récemment disparu, demeure l’un des grands portraitistes de la Grande Bleue et ses abords. Comme chez cet autre peintre du sud, Cézanne, les paysages de Blanche sont farouches, rustiques, méthodiques. Vierges de toute présence humaine, ses toiles sont peuplées de corpulentes arborescences, qui vont jusqu’à envahir la surface et cadenasser le regard. Elles sont minérales, balayant l’anecdote comme le ferait une rossée de mistral. Un voyage initiatique dans la presqu’île de Maguelone, pour une balade artistique dans le parc de la Cathédrale, en résonance avec l’œil poétique du peintre.


Le site consacré à Jean-Pierre Blanche


Presqu’île de Maguelone

Maguelone

Agnès Varda. Je suis curieuse. Point
Jusqu’au 4 janvier

Musée Soulages à Rodez


Rodez célèbre l’année de la mer à sa manière, à un petit jet de missile de la Grande bleue. Une explosion de poésie dans l’antre du Grand noir, de souvenirs épars… la plage, les cabanes, les pêcheurs… disséminés façon intime en plus de 100 images et objets. « Je suis curieuse. Point. Je trouve tout très intéressant. La vraie vie. La fausse vie… », nous dit Agnès Varda. Voilà le décor planté dans un sable émouvant. Sa richesse d’inventions sans pareille nous entraîne dans une déambulation à travers ses âges, jusqu’à sa rencontre à Sète avec les Soulages immortalisée lors du tournage des Plages d’Agnès. Sept ans après son clap de fin, Agnès Varda aurait eu 97 ans ce vendredi 30 mai. Au lieu de la voir sucrer les fraises, elle a préféré qu’on la suive, arpenter les rivages de ses souvenirs—il y a de pires dilemmes—avant de la retrouver en septembre, à la Pointe-Courte. Cette exposition co-produite avec Ciné-Tamaris et la fille d’Agnès, Rosalie Varda, se prolonge par un sublime catalogue, Les rêveries d’Agnès, à parcourir sur le sable entre deux baignades estivales et une programmation filmographique dans les cinémas de Rodez.

Photo : La petite mer immense, 2003. Tirage argentique d’après fichier numérique © Succession Varda


Horaires :

Septembre à juin : mardi à vendredi 10h-13h et 14h-18h / samedi et dimanche 10h-18h


Billetterie

Contact 05 65 73 82 60

Plus d’informations musee-soulages-rodez.fr


Musée Soulages

Jardin du Foirail, avenue Victor Hugo, Rodez

Directeur de la publication : Jean-Renaud Cuaz
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par Jean-Renaud Cuaz 13 novembre 2025
De l’obscurité des music-halls à l’obscurantisme des mollah, des Parapluies de Cherbourg aux machettes de boucher, des Tontons flingueurs aux massacreurs du Bataclan… il n’aura fallu qu’une soixantaine d’années. Les justaucorps jacquard et chapeaux melon ont fait place aux amples cafetans et coiffures d’imam qui peinent à cacher le sang d’un islamofrérisme rampant et son faux frère, l’islamo-gauchisme. Il y a quatre-vingts ans, la guerre, lassée de tant de vacarme, s’en est allée finir ailleurs. Les ondes radiophoniques, jusque-là traumatisées par les sirènes, reprennent du service : elles décident de diffuser autre chose que des alertes. Le 26 mai 1945 , on cherche un quatuor vocal pour mettre un peu de facétie. Quatre jeunes gens se présentent, aussi dégingandés qu’enthousiastes. On leur demande leur nom : ils n’en ont pas. — Appelez-nous les Frères Quelque Chose , proposent-ils avec modestie. Un technicien, homme d’un grand sens du hasard, s’écrie Les Frères Jacques ! Et l’affaire est faite, aussi vite qu’un jeu de mots en goguette. Le nom fleure bon la chanson enfantine et la plaisanterie potache, parfait pour faire les pitres avec gravité. Ils chantent, gesticulent, font le Jacques avec l’élégance d’un sémaphore en délire. Un soir, entre deux refrains et trois nœuds papillon, ils croisent Francis Blanche, qui leur écrit des textes où l’intelligence fait des claquettes. Leur premier répertoire ? Un buffet à volonté : folklore, negro spirituals, chants religieux, le tout saupoudré de synchronisation labiale approximative. En 1948 sort leur premier 78 tours, à une époque où la musique tournait plus lentement et durait plus longtemps. Le succès vient, trébuchant mais poli, et c’est Jacques Canetti qui, tel un bon génie en complet sombre, les propulse dans la lumière des projecteurs. Les voilà chantant sur des ondes enfin réconciliées avec l’humanité. Le 3 janvier 1982, un drame national — que dis-je, cosmique — s’est joué au Théâtre de l’Ouest parisien : les Frères Jacques ont décidé d’arrêter de chanter. Les âmes sensibles ont aussitôt crié au scandale, les autres ont continué à mâcher leur cacahuète, car c’était un dimanche. À la fin du spectacle, quatre chapeaux comiques ont salué le public avant de disparaître dans les coulisses. On raconte qu’ils se sont séparés pour vaquer à leurs occupations. J’en ai interrogé un : il comptait élever des silences en batterie. Un autre envisageait d’ouvrir un magasin de chaussettes pour mains, parce que les gants, c’est surfait . Pendant ce temps, leur pianiste Pierre Philippe, brave homme à doigts multiples, a décidé en 1995 de donner son dernier concert... à Saint-Bouize. Lieu prédestiné, car Saint-Bouize, comme son nom l’indique, est la capitale mondiale du soupir discret. En 1996, au Casino de Paris, on leur rend hommage. Cinq-mille spectateurs émus, pas une seule caméra. C’est dire si la télévision sait se tenir. Elle préfère filmer des débats sur la cuisson du flan plutôt que la gloire des artistes. Les années filent ensuite comme des croches sans mesure. Jean-Denis Malclès, tailleur en habits d’humour, quitte ce monde en 2002. François Soubeyran le suit de près, sans doute pour vérifier les coutures de ses ailes. Puis les frères Bellec s’en vont, l’un après l’autre, avec une ponctualité presque suisse. Paul Tourenne, fidèle jusqu’à la dernière note, s’éclipse en 2016 à Montréal — preuve que même les Jacques ont besoin d’un peu d’exil pour mourir tranquilles. Enfin, Hubert Degex, le dernier pianiste, rend les touches en 2021, à 92 ans, après avoir sans doute trouvé une partition d’éternité en ré majeur.
 La Bibliothèque historique de la Ville de Paris conserve leurs chapeaux, leurs partitions et même leurs coupures de presse — tout ce qu’il faut pour organiser un sabbat érudit. Il ne manque que le son de leurs voix et le rire suspendu entre deux couplets. Leur répertoire, quant à lui, relève de la haute voltige intellectuelle : ils ont tout chanté, du général Castagnetas à la confiture , du Complexe de la truite (de Schubert) au derrière du peuple (voir La Digue du cul , œuvre d’intérêt public). Ils ont prouvé qu’on pouvait philosopher en collant des grimaces sur des vers de Prévert, et pleurer d’émotion tout en chantant des sottises. Ainsi s’achève cette chronique du souvenir. Les Frères Jacques ? Des poètes de velours à la boutonnière, des funambules du calembour, des anges qui savaient rimer avec dingue . Et s’ils nous entendent — là-haut, dans la stratosphère mélodique — qu’ils sachent une chose : le monde est bien triste depuis qu’il ne fait plus le Jacques.
par Jean-Renaud Cuaz 25 octobre 2025
LES RENDEZ-VOUS CULTURELS DE NOVEMBRE Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir
par Jean-Renaud Cuaz 30 septembre 2025
LES RENDEZ-VOUS CULTURELS D’OCTOBRE Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir
par Jean-Renaud Cuaz 24 septembre 2025
Fin septembre, les Automn’Halles lanceront leur 16e édition. Seize années qu’un pari un peu fou a pris vie : celui de faire vibrer une île singulière au rythme des mots, de la lecture, de la musique et de la peinture. Depuis quatre ans, la reconnaissance officielle du Centre National du Livre est venue confirmer ce que les Sétois savaient déjà : que ce festival a gagné sa place dans le paysage littéraire national. Des partenaires fidèles — le réseau des Médiathèques de l’Agglo, le musée Paul Valéry, les librairies, le Plateau, l’Amadeus et désormais la Maison Régionale de la Mer — apportent leurs sites, leurs énergies. Grâce à eux, la littérature s’installe partout, elle respire dans chaque recoin de la ville, elle s’offre au plus grand nombre. Durant cinq jours, les auteurs se disperseront comme autant de semeurs de songes. Dans les classes, pour éveiller les élèves à la puissance des mots. Dans les espaces de rencontre, pour échanger directement avec leurs lecteurs. Dans les dédicaces, pour ce moment simple et rare où une phrase manuscrite scelle un souvenir. Le programme est riche, multiple, ouvert. Il accueille des figures déjà consacrées, et des voix nouvelles qui montent, prometteuses et fragiles. Il fait place aux auteurs et éditeurs locaux et régionaux, car la littérature vit aussi des racines qui nourrissent son terreau. Il tend la main aux talents en herbe, avec son Concours de nouvelles. Pendant cinq jours, Sète se transforme en une île de papier et de voix, où chaque rencontre devient une aventure, chaque lecture un voyage, chaque instant une célébration. Nous dédions cette édition des Automn’Halles à un auteur que nous avons accueilli au Crac en 2022. Boualem Sansal est emprisonné depuis plus de dix mois par un pouvoir totalitaire. Condamné pour exercice illégal de… sa liberté de penser et d’écrire. En appel de sa condamnation le 24 juin dernier, l’écrivain âgé et malade lâchait devant un tribunal de façade : « La Constitution garantit la liberté d’expression et de conscience et pourtant je suis là » . Yves Izard animait la rencontre avec l’auteur de Abraham ou La Cinquième Alliance paru aux Éditions Gallimard en 2020. En charge avec une équipe des Automn’Halles des relations avec les écrivains et les éditeurs, Yves va vous dire quelques mots sur cette rencontre à laquelle certains d’entre vous ont assistée. Boualem a dû laissé une belle empreinte dans vos mémoires. Les Automn’Halles… Ce pourrait être un titre-valise inventé par Erik Satie pour une de ses mystérieuses pièces musicales. On entendrait presque dans nos halles, haranguer : mercredi je peux pas, j’ai gymnopédie ! La question que vous êtes en droit de vous poser, c’est… qu’ont donc en commun Erik Satie et la littérature? Outre le fait qu’Alfred Satie, son père, fut un temps éditeur… Noble métier, s’il en est… Je répondrai qu’après tout, nous recevons samedi Hubert Haddad, l’auteur de… la Symphonie atlantique . Pour le clou de ce festival, car Il faut toujours un clou dans un festival qui se respecte, j’hésite entre… Laurent Mauvignier, l’aspirant au Goncourt, et Michel Zambrano, le sauveteur aux ondes courtes… Lequel nous lira des inédits vendredi à bord de l’Amadeus. Laurent Mauvignier, lui, nous fera l’inventaire de la Maison vide à la Maison de la Mer lors du premier grand entretien demain. L’inventaire d’une maison vide, ça devrait être court me direz-vous… Mais comme c’est Laurent Cachard qui se charge de l’animer, vous en aurez pour votre argent, même si l’entrée est gratuite. C’est simple, les Éditions de Minuit ne jurent que par Mauvignier et ne changeraient pas un traitre-mot de leur auteur fétiche. Je rapprocherais Erik Sati de… Jules Verne, dont nous accueillons samedi l’arrière-petit-fils, Jean Verne, pour les 150 ans de la parution de l’Île mystérieuse . Erik Satie prétendait faire de la musique d’ameublement, allant jusqu’à l’assimiler à du papier peint musical. De là à parler de papier peint littéraire il n’y a qu’un lai à tourner, un pas que des érudits franchissent à propos de Jules Verne. On objectera qu’il y a des papiers peints qui font voyager. Mais je préfère laisser les exzézettes , comme on dit ici, s’exprimer. Pianiste-concertiste international et musicologue, Jean-Pierre Armengaud est également l’auteur d’une colossale biographie du compositeur de Parade , que vous pouvez vous procurer ici ou à la librairie Gavaudan. Jean-Pierre Armengaud va nous rythmer cette rencontre par des illustrations musicales de Satie jouées au piano. À ses côtés, Patrice Legay animera cette soirée. Patrice est musicien et préside l’AMA Languedoc, l’association des Musiciens Amateurs du Languedoc. L’AMA Languedoc animera ici même demain de 10h à 12h une Master Classe de Jean-Pierre Armengaud avec des œuvres de Satie jouées au piano et chantées. Puis à la Médiathèque Mitterrand… le concert Erik Satie vendredi de 18h à 19h30 et la clôture des Automn’Halles dimanche à 18h, un Clin d’œil à Satie par le groupe de jazz Les Smiles. Je terminerai par un précepte que je fais mien : « Je ne me reconnais pas le droit d’abuser des instants de mes contemporains » disait le plus littéraire des compositeurs, celui qu’Alphonse Allais appelait Esoterik Satie. Merci et belles Automn’Halles à toutes et à tous ! Jean-Renaud Cuaz Président du Festival du Livre de Sète – Les Automn’Halles
par Jean-Renaud Cuaz 29 août 2025
LES RENDEZ-VOUS CULTURELS DE SEPTEMBRE Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir
par Jean-Renaud Cuaz 15 août 2025
L’auteur ouvre son Concours de pêche en le dédiant à son ami Toto Neige, à l’origine de ce roman, ainsi qu’à tous ces clochards célestes sans lesquels il manquerait quelque chose au monde . Dans les premières pages, Alex, le narrateur nous invite à le suivre le long d’un quai avec son enfant Jonas qui découvre sous un palmier une dalle avec inscrit « ici a vécu Jonas le pêcheur ». Le Jonas que j’ai connu était l’homme le plus gentil du monde , lui dit-il. Je vais même te dire un secret, c’est grâce à lui si tu t’appelles Jonas . Il lui fait alors la promesse de lui raconter l’histoire de Jonas le pêcheur, plus tard, quand il sera plus grand. L’histoire d’un miracle . Mis sous pression par son boss , Alex croule sous un gros dossier, une de ces tours géantes qu’on aperçoit en atterrissant à Charles-de-Gaulle imaginées pour des gens qui y vivent. Son travail d’architecte c’est de faire en sorte qu’ils y restent le plus longtemps possible . La vie parisienne l’assomme, une vie au milieu de fantômes cravatés, les cernes tirés jusque là, éteints comme des cierges consumés . Un soir qu’il manque l’arrêt de sa station de métro et finit le trajet à pied, il surprend sa compagne à la terrasse d’un restaurant, dans les bras d’un autre, dont elle s’extirpe par un guttural « désolé Alex ! » . Il venait de casser sa tire-lire pour un gros diamant, décidé à lui faire sa demande dans le mois. Cinq années de vie commune partent en sucette et s’en vont valdinguer sur le trottoir. Il reconnaît pourtant qu’elle l’a libéré d’un cachot où il s’était enfermé lui-même à double-tour, en jetant la clé par la fenêtre . Un coup de pouce du destin qui le fera plonger dans l’alcool et enjamber son balcon d’où il tombera… du bon côté. jusqu’à trouver la rédemption auprès d’un réconfort maternel et d’un miroir qui renvoie l’image hirsute d’ un drôle de type . Un amour perdu peut mener à ça, une sorte de clandestinité vis-à-vis de soi-même . Et une résolution, avant que s’ouvre le chapitre paternel, Je vais voir la mer, là où est papa . La disparition du père, parti pêcher seul en mer, est l’occasion pour l’auteur, et pour Jack London, de nous rappeler, que l’on peut partir à la manière de Martin Eden, dans un océan de désespoir qui prend fin quelque part dans les abysses intimes et sourdes . La veille de son ultime sortie en mer, il avait emmené son fils pêcher au phare de Roquerols sur l’étang de Thau (…) Ses yeux étaient mouillés comme la coque d’un bateau flottant à la dérive . À Sète, en pleines festivités de la Saint-Louis, Alex revient loger sous un toit du quai d’Orient, avec sous les yeux le croisement des canaux et des ponts, et le douloureux rappel d’un lointain bonheur familial. À une encablure de là, à la terrasse animée du Barbu (devenu depuis quelques semaines le Bar Muge) Alex fait l’apprentissage auprès d’une autochtone de quelques leçons de savoir-vivre sétois, c’est-à-dire sans savoir-vivre du tout, sinon la gentillesse du cœur , qui, au réveil s’avèrent être tarifées. Plus tard et sans le vouloir, Alex le Parigot se retrouve au beau milieu d’une partie de pêche le long du canal , découvrant à la fois la scène et les acteurs d’une comédie dramatique à la sétoise. Il aura beau faire valoir une naissance des plus locales, Auguste et ses comparses le traiteront comme il se doit en île singulière, un estranger , trahi par le manque d’accent d’ici-bas. À force d’invectives et de fanfaronnades, voilà Auguste qui met au défi le plus vieux d’entre eux, surnommé le Turc , d’accrocher une dorade royale de 5 kilos, pas un de moins, prenant le quai de la République et ses flâneurs à témoins. Le Concours est lancé. L’Ancien sortira de sa torpeur pour une ultime bravade. Pour son Concours de pêche , Loris Chavanette en appelle à l’auteur du Vieil homme et la mer , autant que du vieil homme et l’amertume, ce fil discret comme un goût salé qui persiste et révèle des valeurs hemingwayennes : La perte et la privation . Alex vit avec une blessure d’enfance qui ne s’est jamais refermée : la disparition en mer de son père. Ce vide n’est pas seulement une douleur, c’est aussi une forme d’amertume envers le destin — un sentiment que la vie a triché, qu’elle lui a pris quelque chose de fondamental avant qu’il ait pu se construire. Cette aigreur se renforce au moment de la rupture amoureuse, comme une perte réveille les précédentes. Les affres du temps perdu. Le roman nous dépeint un homme qui, en revenant à Sète, mesure la distance entre ce qu’il aurait pu vivre et ce qu’il vit. Ce constat donne un ton désabusé, teinté d’une mélancolie que semble incarner Jonas l’Ancien, objet de toutes les attentions et de tous les superlatifs. Le concours, en apparence anodin, devient le théâtre de cette confrontation au temps qui passe — un temps qui n’a pas toujours été bien employé, ou qui a filé sans laisser de traces heureuses. L’âpreté des vies cabossées. Jonas, le sans-abri, incarne une autre forme d’amertume : celle des coups reçus par la vie et qui finissent par former une carapace. Derrière son pari du briquet en or, il y a sans doute des pertes, des humiliations, et la nostalgie d’un passé révolu. Ce personnage fait écho à Alex, comme un miroir de ce qu’il aurait pu devenir. Enfin, une amertume adoucie par la rencontre. Même si le roman laisse planer ce goût amer, il ne s’y enferme pas. Les dialogues colorés, les situations cocasses, la tendresse qui se noue entre Alex et Jonas viennent diluer cette sensation. On pourrait dire que le roman n’est pas une plongée dans l’amertume, mais une t entative de la transformer — comme si le sel de la mer pouvait devenir saveur plutôt que blessure. Le Concours de pêche Loris Chavanette Allary Éditions (21 août 2025) Loris Chavanette, historien et romancier, présentera son roman samedi 23 août à 11h, à bord de l’Amadeus, amarré, comme il se doit, quai de la République. Il est l’auteur de La Fantasia (Albin Michel, 2020), prix Méditerranée du premier roman.
par Jean-Renaud Cuaz 28 juillet 2025
LES RENDEZ-VOUS CULTURELS D’AOÛT Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir
par Jean-Renaud Cuaz 11 juillet 2025
L’ŒUVRE DU TEMPS Sète, le 10 juillet 2025 Je veux parler du temps de la destruction gratuite. Ici une affiche mémorielle, là un élan bienveillant pour la promotion de l’histoire locale. Certes, le temps fait son œuvre et nous assène à tous les temps que rien ne dure. Que des valeurs humaines partent à vau l’eau, entrainées par des rivalités internes, des convoitises parmi les plus funestes. Une société d’études historiques voit son Conseil d’administration, réduit comme peau de chagrin à quatre membres, voter l’exclusion d’un président pourtant soutenu par une communauté réduite au silence. Une présidence qui s’est efforcée pendant ces 18 mois de monter avec son équipe de beaux projets. Un vote couperet avant que ne soit proposé l’élargissement du Conseil et du Bureau afin de donner plus de voix aux membres de la Sehsser. Ce déploiement n’a pu se faire, ces nouvelles voix ne pourront se faire entendre. L’ancien président qui a mené l’accusation et les arguments à charge, montre par là qu’il n’a jamais voulu céder les reines à une nouvelle gouvernance plus ouverte et déployée, à l’image des affiches exposées dans nos rues pour les 80 ans de la libération de notre île décidément bien singulière. Jean-Renaud Cuaz, Président de la Sehsser 2024-2025
par Jean-Renaud Cuaz 27 juin 2025
LES RENDEZ-VOUS CULTURELS DE JUILLET Rencontrer, voir, lire, écouter et ne rien rater dans les semaines à venir
par Jean-Renaud Cuaz 29 mai 2025
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