L’étroit ascenseur menant au sommet de la tour Eiffel devenant sournoisement covidentogène, je propose une solution aussi radicale qu’ingénieuse pour nous passer de cette boîte de conserve pour sardines monte-en-l’air :
Diminuer la hauteur de l’édifice sans pour autant en supprimer la moindre poutrelle, la non moindre entretoise. Impossible ! me direz-vous. Le grand Gustave lui-même n’osa y songer lorsqu’il réfléchît à une alternative pour ses interminables escaliers.
Observant une réplique de la vieille dame de fer sur une étagère, un matin de yoga, précairement campé selon la posture B72, qui comme chacun sait consiste à passer les jambes par dessus tête, je projetai alors ma contorsion sur l’objet devant mes yeux… Eureka ! m’écriais-je, imaginant ce(tte) tour de passe-passe.
Retrouvant mes esprits et mes membres, je mis fébrilement au point une maquette à l’échelle 1/quelques centaines, un prototype en acier trempé dans l’encre de l’audace que je vous livre et que je tiens à la disposition de notre auguste corps d’État en charge de dévisser et revisser les écrous de notre patrimoine métallique.
Un jeu d’enfant pour le savoir-faire français en matière d'ingénierie. La partie basse du monument, caractérisée par 4 piliers s'arc-boutant entre eux, ainsi que les deux premiers étages, serait déboulonnée et remontée à l’envers, le deuxième étage deviendrait la base et les piliers se dresseraient fièrement, libérés de leur emprise de pierre.
Quant à la partie supérieure, soit du deuxième étage jusqu’au sommet, celle-ci serait tout bonnement descendue jusqu’au sol, à travers l’espace libéré entre les piliers tout retournés. L’ensemble s’imbrique si bien que je ne serais pas surpris d’apprendre que M. Eiffel y a lui-même songé, craignant que le gigantisme de son projet ne soit rejeté d’un revers de manche à balai.
Cela mettrait fin par ailleurs à une tâche corrosive, symbole représentatif du peu de motivation de nos ouvriers. Car avouons-le, la forme même de la tour Eiffel témoigne que ces besogneux, dès la plus haute Antiquité et les pyramides d’Égypte, ont tendance, plus ils montent dans leur ouvrage, à en faire de moins en moins.
Maintenant, imaginez la quantité de répliques et copies de la tour originale disséminées à travers un monde de plus en plus gadgétisé, et qui du jour au lendemain deviendraient obsolètes. Faisant table rase, nos ateliers de façon et contrefaçon produiraient à tour de bras, et relanceraient une économie mondiale moribonde.
Oubliez leurs milliards de subventions sitôt votés, aussitôt évaporés entre les strates de nos très chères administrations.
N.B. : que les opérateurs de télécommunication se rassurent, leurs installations techniques de diffusion, dont les antennes culmineraient à une altitude bien plus modeste, seront remplacées. L’honorable société Huawei propose gracieusement d’implanter de nouvelles antennes dans des canards élevés sur les plaines du Shandong et laqués une fois importés.

L’ŒUVRE DU TEMPS Sète, le 10 juillet 2025 Je veux parler du temps de la destruction gratuite. Ici une affiche mémorielle, là un élan bienveillant pour la promotion de l’histoire locale. Certes, le temps fait son œuvre et nous assène à tous les temps que rien ne dure. Que des valeurs humaines partent à vau l’eau, entrainées par des rivalités internes, des convoitises parmi les plus funestes. Une société d’études historiques voit son Conseil d’administration, réduit comme peau de chagrin à quatre membres, voter l’exclusion d’un président pourtant soutenu par une communauté réduite au silence. Une présidence qui s’est efforcée pendant ces 18 mois de monter avec son équipe de beaux projets. Un vote couperet avant que ne soit proposé l’élargissement du Conseil et du Bureau afin de donner plus de voix aux membres de la Sehsser. Ce déploiement n’a pu se faire, ces nouvelles voix ne pourront se faire entendre. L’ancien président qui a mené l’accusation et les arguments à charge, montre par là qu’il n’a jamais voulu céder les reines à une nouvelle gouvernance plus ouverte et déployée, à l’image des affiches exposées dans nos rues pour les 80 ans de la libération de notre île décidément bien singulière. Jean-Renaud Cuaz, Président de la Sehsser 2024-2025

FRANCK JALLEAU (1962-2025) Le N d’ANCT est parti. N comme Nieul-sur-l’Autise où Franck a vu le jour en 1962. Ses origines vendéennes feront dire à José Mendoza, l’un de nos professeurs un brin souverainiste, qu’il ne démériterait pas à avoir un peu plus de sang chouan. La typographie française a perdu ce 13 avril un de ses apôtres, la gravure lapidaire, un de ses artisans les plus prolifiques. Nous étions 4 mousquetaires à l’Atelier National de Création Typographique (ANCT devenu ANRT) en 1986. L’année précédente, Franck avait étrenné nos tables à dessin et inauguré le programme de réhabilitation de la typographie française. Le benjamin du quarteron en était pourtant le grand frère, animant nos fins de journée avinées aux abords de l’Imprimerie Nationale, sous le regard bienveillant de Gutenberg qui nous toisait de son regard de bronze et semblait, on l’aurait juré, opiner du chef. Un caractère bien trempé, ciselé par une passion pour la capitale romaine, dont Franck vantait à s’en arracher les cheveux la perfection millénaire. C’est à coup de maillet sur un ciseau magique qu’il ravinait la pierre avec une assurance confondante. Franck creusa son sillon avec un même aplomb au service de projets humanitaires. En témoignent les parvis du Trocadero à Paris et des Nations Unies à New York. Allez leur/lui rendre hommage en foulant leurs dalles gravées de ces capitales immuables. Lui n’a sans doute pas eu le temps de graver la sienne là où il va reposer. Nul doute qu’un de ses disciples aura répondu à l’appel pour lui offrir une stèle digne de son œuvre. Avec gravées deux dates bien trop rapprochées, à notre goût. Quand il trouvait le temps, il partait à Nieule restaurer sa tanière, une vieille demeure faite évidemment de pierres qu’il taillait et montait avec l’aide d’anciens protes devenus potes, prêts à se retrousser les manches pour lui et Sylvie. Une copine qu’il avait embarquée en mobylette à un âge où on jouait au flipper. Elle l’accompagnera jusqu’à son dernier souffle. Il y avait chez Franck une rectitude dans ses choix intimes autant que professionnels, que rien ne pouvait distraire. L’enseignement sera la pierre angulaire d’une vie entièrement dédiée au partage d’un savoir-faire acquis à la force du poignet. De l’école Estienne à ses ateliers de gravure lapidaire, on aurait suivi ce gourou jusqu’au précipice. Il inspirait la confiance et un respect dont se parent les vétérans du métier. Franck n’aura pas eu besoin d’atteindre cet âge canonique pour entrer dans l’Histoire. Mais on aurait bien aimé qu’il s’en approchât. À Sylvie, Baptiste et Alice, mes tendres et affectueuses pensées. À Franck, la douloureuse gratitude d’avoir côtoyé une belle âme. Jean-Renaud

Un peu d’histoire… Une page méconnue de l’histoire du port de Sète nous amène à… Fécamp, en Seine-Maritime. En 1855, trois groupements d’armateurs sétois y possédaient le quart de la flotte fécampoise des morutiers armés pour la pêche au large de Terre-Neuve. Les ketchs et autres bricks, une fois leurs cales remplies, mettaient le cap sur le détroit de Gibraltar pour décharger leur cargaison de morues dans le port de Sète. Le poisson y était salé et séché, dans une région riche en sel. Les bateaux repartaient ensuite vers Fécamp, les cales remplies cette fois de vin du Languedoc et de sel destiné au commerce. Ce négoce prospéra jusqu’à la guerre franco-prussienne de 1870 qui marqua un coup d’arrêt fatal. Les derniers morutiers sétois de Fécamp sont désarmés en 1890. Mais l’activité perdurera quelques dizaines d’années dans le port de Sète. À BORD DE L’AMADEUS Ce ketch aurique* est le plus vieux gréement amarré dans le port de Sète. Il fut mis à l’eau le 17 juillet 1910, sous le nom d’Agatha pour la pêche à la morue. Jean-Christophe Causse, son propriétaire depuis 1989, l’a acheté à une association de musiciens qui avait rebaptisé leur navire en hommage à Mozart. Bienvenue à bord ! Amarré au cœur de la cité portuaire, le long du quai de la République, sur le canal Maritime, l’Amadeus vous tend sa passerelle entre les ponts de Tivoli et de la Victoire, entre mer et étang. Les mille vies que ce porte-étendard des expéditions morutières a connues feront l’objet de débats animés programmés tout le long de l’année. Les deux ponts du morutier, couvert à l’arrière, ouvert à l’avant, vous accueilleront pour des tables rondes, des dégustations de produits du terroir. * Voilier à deux mâts dont le grand mât est situé à l’avant. Ketch vient du mot anglais catch, signifiant prendre au sens de prise de pêche. Le gréement aurique de l’Amadeus comprend 6 voiles : mât d’artimon (une voile aurique et un flèche), mât principal (une voile aurique et un flèche) et sur le beaupré (trinquette et foc).